

Stockage des déchets radioactifs: le projet Cigéo franchit une nouvelle étape
Le projet de Cigéo à Bure (Meuse), où doivent être enfouis à partir de 2050 les déchets nucléaires les plus dangereux pour des centaines de milliers d’années, vient de franchir une nouvelle étape avec l’achèvement des expertises techniques nécessaires en vue de l'autorisation de construction du site.
Lancé en 1991, le projet, contesté par des écologistes et des associations locales, doit accueillir dans près d'un millier d'alvéoles - des tunnels de stockage - des déchets des centrales nucléaires devant rester hautement radioactifs pendant plusieurs centaines de milliers d'années.
L'Autorité de sûreté nucléaire et de radioprotection (ASNR), le gendarme des installations nucléaires, a présenté son 3e rapport d'expertise au groupe permanent d'experts pour les déchets (groupe d'experts externes pluraliste et indépendant). Ce dernier a émis les 25 et 26 juin ses recommandations sur la sûreté à long terme de Cigéo après la fermeture définitive du stockage prévue vers 2170, et a formulé son avis général sur le dossier, selon une note publiée mardi sur le site de l'ASNR.
Il s'agit de la dernière phase de l’instruction technique du dossier d'autorisation du projet, déposé début 2023 par l'Agence nationale pour la gestion des déchets radioactifs (Andra).
Le groupe permanent d'experts, dont les conclusions rejoignent celles de la direction de la recherche et de l’expertise en environnement de l’ASNR, estime que "la démonstration de sûreté de Cigéo après sa fermeture est satisfaisante" à son stade de développement "compte tenu des engagements pris par l'Andra et sous réserve de la prise en compte des observations faites dans le présent avis".
- Etanchéité, effondrement -
Le stockage "présente une bonne capacité globale de confinement et est robuste vis-à-vis de l’ensemble des risques et incertitudes considérés" en phase d'après-fermeture, ont indiqué dans des termes similaires le groupe permanent et les experts de l'ASNR.
Les risques analysés portaient par exemple sur la perte d'étanchéité des conteneurs de déchets insérés dans les tunnels, l'effondrement d'une alvéole, voire celui d'une faille non détectée.
"S'agissant des impacts radiologiques et chimiques sur l'environnement et sanitaires", sur la santé humaine, "on confirme (...) qu'ils sont vraiment très faibles sur le long terme", a indiqué à l'AFP Delphine Pellegrini, adjointe au directeur Environnement de l'ASNR.
L'évaluation de sûreté de Cigéo doit toutefois "être complétée et consolidée", indique le groupe d'experts alors que plusieurs points d'attention ont été mis en évidence par l'ASNR.
Ils concernent la "consolidation" des connaissances des propriétés de la couche géologique argileuse profonde, âgée de 160 millions d'années, censée garantir la sûreté du stockage - la Suède et la Finlande ont, eux, fait le choix d'un terrain granitique.
Des questions demeurent en outre sur la sûreté des alvéoles de stockage des déchets les plus dangereux vis-à-vis du risque d'explosion tandis que la démonstration de sûreté des alvéoles vis-à-vis des risques d'incendie "n’est pas acquise" pour le stockage des déchets bitumés (des boues radioactives dans le passé conditionnées dans du bitume et très inflammables).
Autre point d'attention: la démonstration de la performance des scellements bouchant les alvéoles "reste à apporter", notamment en cas d'"intrusion humaine involontaire", comme lors d'un forage.
Ces avis complètent deux précédentes séries d'avis publiés en juin 2024 et janvier 2025, sur les hypothèses de sûreté de base et sur la résistance du site pendant la descente progressive des colis de déchets à partir de 2050.
D'autres étapes sont attendues avant le décret autorisant formellement la création de Cigéo et donc les travaux, annoncé pour fin 2027-début 2028.
Sur la base de cette instruction technique, l'ASNR devra rendre son avis de synthèse pour "mi-novembre", à l'issue d'une consultation avec notamment des ONG, les Commissions locales d'information et les producteurs de déchets nucléaires.
L'ASNR estime avoir déjà "une vue d'ensemble du dossier en vue de sa mise à l'enquête publique" prévue d'ici fin 2026, a déclaré à l'AFP Pierre Bois, directeur général adjoint de l'autorité.
D'ici-là, avant fin 2025, le ministère de l'Energie devra avoir fixé par arrêté le nouveau coût de Cigéo, annoncé en hausse par rapport aux 25 milliards d'euros évalués en 2016.
O.Valdez--RTC